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02

2015

Soutenons la Générale !

LE COLLECTIF ” LA GÉNÉRALE” NE RÉPONDRA PAS À L’ APPEL À PROJETS “RÉ-INVENTER PARIS” POUR LE14 AVENUE PARMENTIER

En 2007, la Générale, située 11 rue du Générale Lassalle, à Belleville est menacée d’expulsion. Le collectif qui l’anime parvient à retenir l’attention de la Ville par son projet unique : un lieu de création, de résidences pour artistes et associations, gratuit et ouvert à tous, en prise avec la cité, en plein cœur de Paris. Pendant de longs mois de concertation nous avons travaillé ensemble, avec la Ville, à un relogement, cherchant à ce qu’aucun pan du projet – qu’il s’agisse de la gratuité, de l’ouverture sur le quartier, du soutien à la création émergente ou du soutien aux associations militantes – ne soit abandonné, en perdant des mètres carrés.

En 2009, après 2 années à penser le projet hors les murs nous nous installons au 14 avenue Parmentier. Dès notre arrivée, nous avons été sollicité par de nombreux artistes et associations. Nous avons reçu des compagnies de théâtre, de danse, des auteurs, des cinéastes, des réalisateurs, des pièces de théâtre, des tournages, des montages, des associations militantes pour la cause des femmes, des exclus, contre le gaspillage, pour des projets de société plus égalitaire, des vignerons, des cuisiniers, des musiciens, des festivals de musique, des spectateurs, des écoles d’art, des écoles élémentaires, etc. Nous avons développé des partenariats avec des institutions, des écoles, des associations…

Nous sommes maintenant ancrés dans le quartier. Nous avons fabriqué un outil de travail et continuons à le développer à destination des acteurs de la création culturelle, politique et sociale. Tout cela nous fait penser que ce projet, relogé dans ces locaux par la Ville, est à la bonne place, tant d’un point de vue géographique, que d’un point de vue politique, artistique et social.

Nous avons lu l’appel à projets « ré-inventer Paris » et ses exigences en termes d’innovation, notamment sur la concertation et la participation. Nous œuvrons déjà à relever tous ces défis d’innovation sur le champ des usages et des débats de société qu’il propose . A l’image du projet « végétalisations innovantes » (EAT), que nous avons remporté en 2013 nous travaillons à l’émergence de nouveaux modèles, de nouvelles expressions. Nous avons à cœur de développer le lieu et il serait simple d’ouvrir l’ensemble du bâtiment, tant les demandes que nous recevons sont nombreuses. Si nous avions la jouissance de la totalité de l’espace, nous pourrions recevoir plus d’artistes dans une deuxième salle de répétition, nous pourrions développer une activité d’éducation à l’image et d’éducation du spectateur plus grande, nous pourrions construire une salle de projection, un studio d’enregistrement, en plus de notre salle de montage actuelle.

Le projet de la Générale est multiple, nous ne pouvons pas le restreindre à sa seule expression cinématographique.

Nous ne répondrons pas à cet appel à projets.

Nous avons cru à la possibilité d’une démarche bottom-up, laissant la place libre à l’initiative et l’inventivité citoyenne, associative ou collaborative, où notre projet pourrait pleinement s’épanouir. Mais cette phrase du règlement de « Ré inventer Paris » : « Sont éligibles à l’Appel à Projets Urbains Innovants toutes candidatures proposant, sur l’un des sites listés dans la première partie du présent cahier des charges, un projet innovant assorti d’une offre d’acquisition en pleine propriété ou de droits réels » fait clivage avec notre projet et inscrit de fait l’innovation dans une conception économique et sociale restreinte, hors de portée de l’initiative citoyenne et associative. Nous ne répondrons pas à cet appel à projets.

La Générale porte un projet de lieu de création gratuit, dans Paris.

Nous accueillons le temps du travail et de l’expérimentation. Nous pensons, comme tous les autres membres du réseau “Actes if” dont nous faisons partie, que ce temps se doit d’être soutenu par une politique culturelle cohérente et engagée. A la Générale, actuellement avec l’aide de la Ville qui met à disposition ces locaux, mais aussi de la Région Ile-de-France au titre des Fabriques de Culture, nous le faisons. Nous nous engageons auprès d’artistes afin qu’ils aient du temps pour réfléchir, essayer, se tromper, répéter. Et si aujourd’hui ces temps se sont resserrés du fait d’un climat économique peu favorable, nous persistons à nous engager pour que chacun puisse malgré tout disposer de ce temps et d’un espace, sans obligation de montrer, de réussir, d’aboutir immédiatement. Ce n’est pas un luxe. C’est une nécessité. Nous ne sommes pas à la marge de la création contemporaine. Nous sommes au cœur, à l’origine, à l’émergence. Nous accueillons des projets qui se jouent dans de nombreux lieux parisiens, eux-mêmes soutenus par la Ville, des Scènes Nationales, des festivals prestigieux : Le théâtre du Rond Point, le Théâtre Paris Villette, la MPAA, Les Bouffes du Nord, le festival in d’Avignon, Les Amandiers de Nanterre, Le théâtre de la Colline, la Maison des Arts de Créteil, la Théâtre des Quartier d’Ivry, Le Théâtre de la Tempête, Le Théâtre Gérard Philippe …

Répondre à l’appel à projets “Ré inventer Paris”, confier le sort de ce projet à des investisseurs privés et soumettre notre activité à des critères pressants de rentabilité ne nous semble pas pertinent. Nous croyons encore que la culture se doit d’être un service public, et que plus de cinquante années de travail pour la décentralisation et une culture élitaire pour tous, comme le préconisait Antoine Vitez, ne doivent pas être effacées en une seule décennie.

Nous souhaitons que la Ville continue à nous faire confiance et nous soutienne en mettant le 14 avenue Parmentier à la disposition des artistes et en nous confiant l’animation de cet espace, comme nous le faisons depuis 2009.

Source : La Générale